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« -Eh ! Eh ! panthère contre panthère – fit le docteur à mon oreille ; – mais le satin est plus fort que le velours.
Le satin c’était la femme, qui avait une robe de cette étoffe miroitante – une robe à longue traine. Et il avait vu juste le docteur ! Noire, souple, d’articulation aussi puissante, aussi royale d’attitude, – dans son espèce d’ une beauté égale , et d’ un charme encore plus inquiétant,- la femme, l’ inconnue était comme une panthère humaine, dressée devant la panthère animale qu’elle éclipsait ; et la bête venait de le sentir, sans doute, quand elle avait fermé les yeux. »

Jules Barbey d’Aurevilly

Quand on se retournait de cette forme idéale de beauté souple, de force terrible au repos , de dédain impassible et royal , vers les créatures humaines qui la regardaient timidement, qui la contemplaient, yeux ronds et bouche béante , ce n était pas l’humanité qui avait le beau rôle, c’était la bête .

Jules Barbey d’Aurevilly

Konstantin Somov

La chaleur est si blanche aujourd’hui, si lourde qu’elle m’affole.
Je regarde Atys qui somnole, oublieux, par la fenêtre ouverte du jardin. Dix-sept ans, un moteur de Rafale piégé dans un bourgeon d’aupébine. Son corps déjà massif, encore tendre, lacté. Mais sa bouche pleine, dédaigneuse, fruit à crocs de lait, promise aux triomphes. Le soleil décline, alors, peut-être une nouvelle inclinaison de la lumière, il ouvre les yeux, aperçoit mon regard braqué sur lui.

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L’homme qui vit très seul (je prétends que je vivais très seul, les contradicteurs sont des aveugles) a parfois un besoin insensé de la multitude humaine. Je passais ce désir violent grâce aux musiques absurdes et au public flottant des boîtes de nuit. Ces temples de l’instabilité où s’usait doucement ma vie m’étaient devenus nécessaires comme un stupéfiant. J’aimais à voir s’y faire et défaire de précaires destins. Au seuil de toutes les aventures. Là où joue le hasard. Là, et ailleurs. Parfois je me jetais dans une de ces intrigues qui se formaient devant moi. J’ai toujours eu plutôt le goût du romanesque que celui des romans. Montmartre me servait très bien sous ce rapport. C’est pourquoi pendant des années je n’ai guère quitté Montmartre.

Louis Aragon